Panorama : La transition vers la conduite autonome et connectée en Allemagne

La conduite autonome et connectée est un pan de la technologie qui est d’une importance cruciale pour l’Allemagne, puisqu’elle est fondamentale pour l’avenir de l’industrie automobile intérieure.

Avec 820 000 salarié·e·s environ, celle-ci constitue l’une des industries les plus importantes du pays, et elle est toujours considérée comme la figure de proue du « Made in Germany ». Élément central du mythe fondateur de la République Fédérale d’Allemagne et moteur du Wirtschaftswunder (miracle économique) allemand dans les années 1950 et 1960, l’industrie automobile n’est pas n’importe quelle industrie ; le potentiel d’identification est élevé pour beaucoup d’Allemand·e·s, quels que soient leur âge, leur origine ou leur vision du monde.

Les débats sur l’automatisation du trafic routier et sur la fin prévisible du moteur à combustion traditionnel sont donc un sujet sensible, et ce bien au-delà du petit cercle des spécialistes. Le consensus général est que l’industrie automobile allemande est à l’aube d’un processus radical et unique de transformation.

Par ailleurs, pour la première fois, elle est concurrencée par un large panel de nouveaux venus. Des constructeurs émergents de véhicules électriques comme Tesla, et des fournisseurs de mobilité numérique comme Google et Uber ont conquis une avance considérable dans les domaines de la numérisation et de la conduite autonome. En outre, ils secouent le marché de la mobilité avec des idées innovantes, qui remettent en question les modèles de développement traditionnels des constructeurs historiques.

L’industrie automobile allemande a admis qu’il s’agissait là du révélateur d’un changement d’époque ; elle s’est maintenant lancée à leur poursuite avec de grandes ambitions. Rien que dans les cinq prochaines années, Volkswagen s’apprête à investir 44 milliards d’euros dans les domaines de la conduite autonome, de la numérisation et de la mobilité électrique, ainsi que dans de nouveaux services de mobilité. BMW et Daimler agissent également et ont l’intention de coopérer pour développer des véhicules autonomes.

Stratégie du gouvernement fédéral

Le gouvernement fédéral allemand fait tout ce qu’il peut pour soutenir ces efforts. Le ministère fédéral du transport et de l’infrastructure numérique a lancé sa « Stratégie pour la conduite autonome et connectée » en 2015. Ce paquet de mesures, d’une valeur de plusieurs milliards d’euros, comprend plusieurs projets destinés à accompagner la mutation des transports routiers individuel, commercial et public vers le numérique :

  • L’expansion du réseau numérique haut-débit, avec un minimum de débit de 50 MBits/s pour le réseau autoroutier, doit se poursuivre et la norme 5G être mise en place à moyen terme. Des normes pour la numérisation du réseau autoroutier fédéral seront également développées et testées en conditions réelles grâce à la Plateforme d’Essais Autoroute Numérique.
  • Des normes officielles obligatoires doivent être développées tant au niveau national qu’au niveau international. Elles auront pour objet le fonctionnement des véhicules autonomes et la formation des conducteurrice·s, mais aussi l’autorisation de type et la surveillance technique.
  • Des projets de recherche dans les domaines de la conduite automatisée et autonome seront lancés. En août 2018, 14 plateformes d’essais supplémentaires recevront un financement, s’ajoutant à la plateforme d’essais numériques Autobahn. Parmi elles, la plateforme d’essais numériques transfrontalière tri-nationale Allemagne-France-Luxembourg.
  • La mise en réseau des usagere·s des routes et des infrastructures est mise en avant. Dans ce but, la mobilité liée au trafic et les données géographiques doivent être rendues disponible au moyen d’une plateforme en open source. Les véhicules automatisées recevront des données de trafic détaillées via la norme radio numérique DAB+. Les panneaux routiers et les systèmes de signalisation seront mis en réseau avec le trafic afin d’optimiser les flux
  • Enfin, des règles et normes de sécurité informatique et de protection des données des utilisateurrice·s des services de mobilité autonomes doivent être développées.

La Ville d’Aix-la-Chapelle implique ses citoyens

Pour la ville d’Aix-la-Chapelle, ville universitaire, il est particulièrement important d’évoquer le sujet de la « mobilité autonome » avec ses citoyen·ne·s le plus tôt possible. Les avantages géographiques d’Aix-la-Chapelle lui donnent la possibilité de mettre en place et d’utiliser cette technologie plus tôt que d’autres villes. Il est donc de la première importance d’avoir connaissance des questions, des besoins, des souhaits et des peurs des habitant·e·s d’Aix-la-Chapelle, puis de les impliquer dans le processus d’élaboration des stratégies et des politiques de mise en pratique. L’arrivée de la mobilité autonome est imminente ; il faut donc la préparer avec les habitant·e·s. Pouvoir dialoguer très tôt sur ce sujet est donc une grande chance pour tout le monde.

Toutefois, pour les constructeurs automobiles allemands, la pression ne vient pas que de l’extérieur. La place de la voiture est également réévaluée en Allemagne. La voiture privée comme signe de statut semble être passée de mode, tout particulièrement chez les jeunes urbain·e·s. Cette tendance est confirmée par le fait que les jeunes adultes passent leur permis de conduire de plus en plus tard ainsi que par la popularité croissante du partage de voitures. L’automobile est de plus en plus vue comme un service, de moins en moins comme une possession personnelle.

Qu’est-ce que cela signifie pour l’avenir de l’automobile, en Allemagne en particulier ? A long terme, les constructeurs automobiles pourraient devenir des fournisseurs de services de mobilité qui géreraient des flottes de véhicules autonomes pour le compte de leurs client·e·s. Dans un tel scénario, les client·e·s souscriraient un abonnement de mobilité auprès de leur constructeur préféré, mais ne posséderaient pas eux-mêmes de véhicule.

Il y a cependant encore du chemin à parcourir avant de parvenir à cette situation. Selon une étude commandée par une compagnie d’assurances en 2018, réalisée auprès de 1 200 participants environ en Allemagne, 60 % des personnes interrogées s’imaginaient difficilement aux commandes d’un véhicule autonome. A peu près les deux tiers d’entre elleux avaient également peur de la perte du plaisir de conduire. Néanmoins, iels reconnaissaient que les véhicules autonomes pourraient constituer une avancée utile pour les voyages au long cours et pour certains types de populations, comme les personnes âgées.

Les débats citoyens permettent aux habitant·e·s de s’impliquer dans ces passionnants développements. Iels peuvent ajouter leurs précieuses contributions à celles des experts dans le débat sur la conduite automatisée. Attendons-nous donc à des résultats fascinants pour les débats citoyens à venir dans les pays germanophones.

Auteurs : Lorenz Crössmann, Angela Jain, Sabine Schröder
Crédit photo : laranik
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