"En ces moments de crise, la démocratie participative ne doit pas s’arrêter"

Nantes Métropole lance une Convention citoyenne à l’échelle de son territoire. 80 habitant.e.s issu.e.s des 24 communes sont invités à échanger sur les conséquences de la crise sanitaire. Leurs préconisations nourriront le projet de mandat de la métropole. Johanna Rolland, maire de Nantes, revient sur la nécessité de cet exercice démocratique qu’elle a choisi de maintenir – en ligne – malgré le confinement.

Missions Publiques : Nantes Métropole a une forte tradition de dialogue citoyen dans laquelle les élus s’engagent à rendre des comptes de l’usage des contributions citoyennes dans la décision. Lors de vos précédents mandats, vous avez notamment organisé 3 grands débats sur les enjeux métropolitains. Comment inscrivez-vous cette Convention dans cette tradition et pourquoi ce format ?

Johanna Rolland : A Nantes, l’innovation est au cœur de toutes nos politiques publiques. A l’heure d’un changement de modèle plus soucieux des humains et de la planète qui s’impose, nous devons compter sur la mobilisation et l’engagement de toutes et tous. Cette métamorphose passe par une vision et une pratique de gouvernance ouverte, en dialogue permanent avec les citoyen.ne.s, les associations et les expert.e.s. Ce dialogue citoyen est une innovation publique tout à fait majeure qui permet de travailler au plus près des besoins et des attentes, à l’échelle d’une métropole, d’une ville, d’un quartier, d’une rue ou d’un immeuble.

Ces derniers mois, à Nantes, se sont structurées des initiatives solidaires, une plateforme d’entraide et une multitude de projets portés par des associations, des entreprises, etc. Des initiatives citoyennes majoritairement soutenues et accompagnées par la collectivité, qui témoignent de la capacité des actrices et acteurs de tous bords à collaborer et à se mobiliser pour trouver des solutions ensemble. Et à l’heure de répondre aux attentes fortes des citoyen.ne.s et de tirer des enseignements de cette crise sanitaire sans précédent, c’est grâce à une convention citoyenne que nous le ferons.

 

Missions Publiques : Vous avez choisi d’axer la convention citoyenne sur les conséquences de crise sanitaire. A votre avis, qu’est-ce que cela peut permettre de révéler ? Quelle peut-être la plus-value d’une Convention sur ce sujet ?

Johanna Rolland : D’abord, il nous est apparu évident de maintenir la convention malgré le confinement. La démocratie participative ne doit être arrêtée en ces moments de crise. Le point de vu des citoyen.ne.s est essentiel, pour venir compléter d’autres formes de diagnostic. Concrètement, la convention va travailler sur 4 week-end de novembre à février, ce temps est nécessaire pour approfondir et donner aux citoyens des bonnes conditions pour produire un avis robuste. Evidement les conditions sanitaires, nous obligent à repenser les modalités. La première session se déroulera en ligne et nous avons à cœur que cela ne soit pas excluant, et nous y veillons en mettant en place une médiation numérique renforcée.

Ensuite viendra le temps des réponses. Que faut-il accélérer ? Que faut-il réinventer pour mieux vivre ensemble ? Pour répondre à ces questions, nous avons décidé de lancer cette démarche citoyenne inédite en France pour tirer les premiers enseignements de la crise sanitaire collectivement. Les premières conséquences auxquelles nous pensons sont évidemment les conséquences en termes de vie sociale et de bouleversements du quotidien. Nous ne vivons plus pareil aujourd’hui qu’en février. Nous avons dû nous adapter, apprendre à vivre avec le masque, à limiter nos contacts, à restreindre nos visites aux aîné.e.s. Mais les conséquences sociales, ce sont évidemment aussi les conséquences directes et indirectes de la crise économique : avec des emplois menacés, des emplois perdus, du chômage, notamment chez les jeunes. Ces conséquences sociales parlent aussi précarité, fragilisation du pouvoir d’achat, instabilité financière pour des milliers de gens.

Face à cette réalité sociale, économique, et en tant qu’élu.e.s locaux.ales, nous savons que notre responsabilité est immense. Nous mesurons aisément quels seront les enjeux demain pour mettre en œuvre des politiques publiques justes, efficaces, pour lutter contre toutes les conséquences de cette crise. Il sera donc indispensable de se poser pour comprendre, car pour agir, il nous faut comprendre.

"Pour lutter contre toutes les conséquences de cette crise, en tant qu’élu.e.s locaux.ales, nous savons que notre responsabilité est immense (…) il est donc indispensable de se poser pour comprendre, car pour agir, il nous faut comprendre.

Crédit photo : Martial Ruaud

Johanna Rolland

Maire de Nantes

Missions Publiques : Replongez-vous il y a 6 ans. Qu’est-ce que vous n’auriez pas imaginé possible et qui s’est réalisé grâce à ces dialogues citoyens ?

Johanna Rolland : Dialogue citoyen et partage sont indispensables pour penser et faire la ville autrement : c’est mon intime conviction qui forge mon engagement politique. Cette nouvelle approche qui place les citoyen.ne.s au coeur des projets est un guide pour l’action à Nantes depuis plusieurs années et doit continuer d’ouvrir de nouveaux espaces de participation.

Ce renouvellement des pratiques passe par des élu.e.s conscient.e.s que l’intérêt général est un bien commun. Un bien commun à partager, et sans doute davantage. La mobilisation de Nantes, l’ambition pour Nantes, ne sont pas le fait de nos seules institutions locales. Et heureusement. Elles dépendent évidemment des acteur.trice.s, des citoyen.ne.s, des habitant.e.s qui s’investissent pour notre ville. Et le moins que l’on puisse dire c’est qu’à Nantes, ils sont nombreux ! Mon rôle de maire est donc de faciliter toutes ces initiatives portées en-dehors de nos institutions, en donnant plus de pouvoir d’agir aux citoyen.ne.s

Sur ce sujet, nous avons beaucoup avancé en 6 ans, grâce aux 200 démarches de dialogue citoyen et aux grands débats. Ce n’était qu’un début et ce mandat sera celui de l’épanouissement de ces démarches. Je vous le disais, nous lancerons la convention citoyenne dans les prochains jours. Nous poursuivrons, avec les assises des nouvelles solidarités et celles de la mobilité durable, parce que sur tous ces sujets du quotidien, les citoyen.e.s doivent être au cœur des réflexions. À l’instar de la création du Conseil des générations futures, composé de citoyen.ne.s tiré.e.s au sort et d’un droit d’interpellation citoyenne, afin d’ouvrir un espace de démocratique directe en Conseil municipal. Et pour ne citer qu’un seul exemple : de 2017 à 2018, citoyen.e.s, riverain.e.s, associations et collectifs ont imaginé ensemble des projets pour réinventer 15 bâtiments municipaux et espaces verts en friche mis à disposition par la Ville. Aujourd’hui voient le jour des projets qui répondent aux attentes des habitant.e.s et qui sont nés dans la tête de collectifs de citoyen.e.s engagé.e.s pour faire bouger les lignes.

 

Missions Publiques : Vous êtes sur une île déserte. Vous ne pouvez emporter qu’une chose (matérielle). Laquelle ?
Johanna Rolland : Une boussole. Pour ne jamais perdre son cap.

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