{"id":3629,"date":"2021-05-11T08:19:12","date_gmt":"2021-05-11T06:19:12","guid":{"rendered":"https:\/\/missionspubliques.org\/?p=3629"},"modified":"2021-12-23T11:46:22","modified_gmt":"2021-12-23T10:46:22","slug":"a-cote-de-la-participation-citoyenne-il-y-a-limplication","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/missionspubliques.org\/a-cote-de-la-participation-citoyenne-il-y-a-limplication\/","title":{"rendered":"\u00ab\u00a0A c\u00f4t\u00e9 de la participation citoyenne, il y a l\u2019implication\u00a0\u00bb"},"content":{"rendered":"

[vc_row el_class=\u00a0\u00bbcontainer vls_mauto specialcontainer\u00a0\u00bb][vc_column][vc_column_text el_class=\u00a0\u00bbvls_projets_single_texte vls_black2″]<\/p>\n

Paul Vermeylen est un urbaniste belge (1) et un sp\u00e9cialiste des villes europ\u00e9ennes et des dispositifs citoyens. C\u2019est \u00e0 ce titre qu\u2019il a accept\u00e9 d\u2019\u00eatre membre du comit\u00e9 scientifique de notre projet la Fabrique participative pour l\u2019avenir des villes interm\u00e9diaires.<\/u> Il nous explique les enjeux de d\u00e9veloppement de la ville de demain, et dessine une ville sensible qui renoue avec les sens, la vie collective, la m\u00e9moire du temps et la nature.<\/div>\n

[\/vc_column_text][vc_column_text css=\u00a0\u00bb.vc_custom_1620711893447{padding-top: 40px !important;}\u00a0\u00bb]Missions Publiques. Vous vous int\u00e9ressez \u00e0 la concertation avec une large focale sur l\u2019ensemble de l\u2019Europe. Comment est venue cette question de la concertation dans votre parcours\u00a0?<\/strong><\/span><\/p>\n

\u00a0<\/strong>Paul Vermeylen. <\/strong>J\u2019ai d\u00e9but\u00e9 ma carri\u00e8re en travaillant pendant 12 ans – au d\u00e9part comme objecteur de consciences – pour l\u2019association Inter-Environnement, une f\u00e9d\u00e9ration qui rassemblait une centaine de comit\u00e9s de quartiers. A cette \u00e9poque, Bruxelles est connue pour \u00eatre une ville de contestation et de luttes urbaines. Ces comit\u00e9s, compos\u00e9s d\u2019habitant-e-s, portaient toute une s\u00e9rie de revendications dont la principale \u00e9tait de sortir l\u2019urbanisme des couloirs clandestins, c\u2019est-\u00e0-dire des salles de r\u00e9unions auxquelles les habitant-e-s n\u2019avaient pas acc\u00e8s. Notre principale victoire a \u00e9t\u00e9 d\u2019obliger les pouvoirs publics bruxellois \u00e0 cr\u00e9er un processus (des enqu\u00eates publiques et des commissions de concertation) qui permettent \u00e0 chaque citoyen-ne d\u2019exprimer son opinion. Encore aujourd\u2019hui, plus d\u2019un millier de dossiers passent par des enqu\u00eates publiques \u00e0 Bruxelles. Prenons un exemple r\u00e9cent et important\u00a0: l\u2019avenir du quartier europ\u00e9en autour du rond-point Schuman. Les projets dessin\u00e9s par les administrations et de grands architectes pr\u00e9voyaient la cr\u00e9ation de nouvelles tours d\u2019immeubles et de bureaux. Or ce projet, qui a \u00e9t\u00e9 tr\u00e8s contest\u00e9 via les enqu\u00eates publiques, ne verra que tr\u00e8s partiellement le jour devant la force des arguments des citoyens.<\/span><\/p>\n

C\u2019est dans ce contexte l\u00e0 que j\u2019ai poursuivi ma carri\u00e8re en rejoignant par la suite le secteur public en tant que directeur de cabinet adjoint du pr\u00e9sident de la r\u00e9gion de Bruxelles. Je suis pass\u00e9 des brigands aux seigneurs si j\u2019ose dire, mais avec les m\u00eames id\u00e9es. Cette exp\u00e9rience m\u2019a permis de conforter cette approche citoyenne, de m\u2019appuyer sur des proc\u00e9dures plus ouvertes et impliquantes, permettant une participation tangible des citoyennes et des citoyens \u00e0 la vie publique.<\/span><\/p>\n

\u00a0<\/strong><\/span><\/p>\n

Missions Publiques. En quoi est-ce crucial pour vous d\u2019inviter les citoyennes et les citoyens au tour de table pour penser la ville de demain ?<\/strong><\/span><\/p>\n

Paul Vermeylen. <\/strong>Nous basculons depuis deux ou trois d\u00e9cennies d\u2019un urbanisme formaliste et fonctionnaliste (type Le Corbusier) \u00e0 un urbanisme de co-construction. Nous quittons la ville bas\u00e9e sur la d\u00e9coupe en zones de bureaux, de logements, de loisirs entre lesquelles nous sommes oblig\u00e9s de circuler via des routes, des m\u00e9tros etc. au profit d\u2019une autre approche de gouvernance. Une gouvernance qui n\u2019est plus r\u00e9serv\u00e9e \u00e0 un cercle ferm\u00e9 de d\u00e9cideurs, technocrates ou investisseurs immobiliers, mais qui implique les citoyennes et les citoyens.<\/span><\/p>\n

Ces citoyen-ne-s s\u2019organisent suivant des cercles \u00ab\u00a0concentriques\u00a0\u00bb. Dans le premier cercle les citoyen-ne-s \u00e9mettent un avis. Dans le deuxi\u00e8me cercle, ils formulent des aspirations, des envies. Et enfin le troisi\u00e8me cercle est celui de l\u2019implication\u00a0: c\u2019est-\u00e0-dire qu\u2019ils consacrent du temps, une partie de leurs loisirs, voire de leur vie professionnelle, \u00e0 collaborer avec d\u2019autres pour \u00ab\u00a0faire la ville\u00a0\u00bb. Et l\u00e0, nous sommes dans le c\u0153ur du sujet du r\u00f4le des citoyen-ne-s pour agir sur la ville de demain.<\/span><\/p>\n

C\u2019est une fa\u00e7on de faire assez diff\u00e9rente que celle men\u00e9e en France. Je la vois plus en Belgique, aux Pays-Bas, en Allemagne ou encore au Danemark qui sont des pays o\u00f9 il y a co-production et implication. A Amsterdam,\u00a0la municipalit\u00e9 lance en moyenne 30 fois par an des appels \u00e0 projets o\u00f9 l\u2019on demande \u00e0 des citoyen-ne-s de faire des propositions, concernant la zone portuaire par exemple. Pour cela, trois s\u00e9ances d\u2019informations et d\u2019\u00e9changes sont organis\u00e9es\u00a0: chaque citoyen, chaque groupe de citoyen pr\u00e9sente son projet, vous discutez avec les autres et vous constituez des alliances entre projets semblables ou compatibles. Des m\u00e9diateurs sont pr\u00e9sents pour cr\u00e9er des liens et faciliter la coh\u00e9rence des projets. Supposons que sur une friche, il y ait un projet d\u2019\u00e9cole participative, le m\u00e9diateur est l\u00e0 pour vous dire qu\u2019il existe par ailleurs une proposition de logement interg\u00e9n\u00e9rationnel et qu\u2019il pourrait \u00eatre int\u00e9ressant de grouper les deux projets. Les groupes se r\u00e9unissent alors et \u00e9laborent un projet commun. Des r\u00e9alisations de ce type existent \u00e9galement \u00e0 Bruxelles depuis une dizaine d\u2019ann\u00e9es\u00a0: des appels \u00e0 projets appel\u00e9s \u00ab\u00a0Quartiers durables\u00a0\u00bb qui impliquent des groupes d\u2019au moins trois personnes et \u00e0 qui l\u2019on accorde entre 3 000 et 10\u00a0000 euros.<\/span><\/p>\n

La participation est essentielle mais l\u2019implication l\u2019est tout autant \u00e0 mon sens. Je trouve l\u2019expression \u00ab\u00a0participation citoyenne\u00a0\u00bb un peu lacunaire. C\u2019est pourquoi dans mon travail, je mets constamment en avant ces trois cercles\u00a0: la r\u00e9clamation, l\u2019aspiration\/participation et l\u2019implication. Dans les pays de culture protestante, il y a une forte tradition de coop\u00e9ration. En Allemagne par exemple, 30% de l\u2019\u00e9nergie \u00e0 usage domestique est produite par des coop\u00e9ratives citoyennes. Les circuits de distribution de bio sont essentiellement tenus par des coop\u00e9ratives. Et dans des villes comme Zurich, 20% du logement est de l\u2019habitat coop\u00e9ratif. En Su\u00e8de, ce sont 17% des logements qui sont de forme participative\u00a0! En France, des \u00e9volutions sont possibles et il existe quelques projets collaboratifs en mati\u00e8re d\u2019habitat dans les Hauts-de-France, \u00e0 Grenoble, \u00e0 Besan\u00e7on.<\/span>[\/vc_column_text][\/vc_column][\/vc_row][vc_row css=\u00a0\u00bb.vc_custom_1582903331414{padding-top: 80px !important;padding-bottom: 40px !important;}\u00a0\u00bb][vc_column][vc_row_inner equal_height=\u00a0\u00bbyes\u00a0\u00bb el_class=\u00a0\u00bbcontainer vls_mauto specialcontainer\u00a0\u00bb][vc_column_inner el_class=\u00a0\u00bbvls_quote vls_quote_blue2″ width=\u00a0\u00bb7\/12″ css=\u00a0\u00bb.vc_custom_1582125682730{background-color: #e0deda !important;}\u00a0\u00bb][vc_column_text]

\u00ab\u00a0Je trouve l\u2019expression ‘participation citoyenne’ un peu lacunaire. C\u2019est pourquoi dans mon travail, je mets constamment en avant ces trois cercles : la r\u00e9clamation, l\u2019aspiration\/participation et l\u2019implication. <\/blockquote><\/div>[\/vc_column_text][\/vc_column_inner][vc_column_inner el_class=\u00a0\u00bbvls_white vls_rquoted vls_halfimage vls_quote_box_img\u00a0\u00bb width=\u00a0\u00bb5\/12″ css=\u00a0\u00bb.vc_custom_1620712447104{background-image: url(https:\/\/missionspubliques.org\/wp-content\/uploads\/2021\/05\/portrait-PV.jpg?id=3634) !important;background-position: center !important;background-repeat: no-repeat !important;background-size: cover !important;}\u00a0\u00bb][vc_raw_html]JTNDZGl2JTIwY2xhc3MlM0QlMjJ2bHNfcXVvdGVkX3RpdGxlJTIyJTNFJTBBJTNDZGl2JTIwY2xhc3MlM0QlMjJ2bHNfcXVvdGVkX3RpdGxlX3RleHQlMjIlM0UlMEElM0NwJTIwY2xhc3MlM0QlMjJ2bHN0aXRsZV9xX2xpbmUlMjIlM0VQYXVsJTIwVmVybWV5bGVuJTNDJTJGcCUzRSUwQSUzQ3AlMjBjbGFzcyUzRCUyMnZsc3RpdGxlX3Ffc3VibGluZSUyMiUzRVVyYmFuaXN0ZSUyMGV0JTIwc3AlQzMlQTljaWFsaXN0ZSUyMGRlcyUyMHZpbGxlcyUyMCUzQyUyRmJyJTNFZXVyb3AlQzMlQTllbm5lcyUyMGV0JTIwZGVzJTIwZGlzcG9zaXRpZnMlMjBjaXRveWVucyUzQyUyRmRpdiUzRSUwQSUzQ2RpdiUyMGNsYXNzJTNEJTIydmxzX3F1b3RlZF9iZyUyMHZsc19iZ19ibGFjayUyMHZsc19vcGFjaXR5JTIyJTNFJTNDJTJGZGl2JTNFJTBBJTNDJTJGZGl2JTNF[\/vc_raw_html][\/vc_column_inner][\/vc_row_inner][vc_raw_html]JTNDZGl2JTIwY2xhc3MlM0QlMjJ2bHNfZWxtdF9ib3R0b21iZyUyMHZsc19iZ19ibHVlJTIyJTNFJTNDJTJGZGl2JTNF[\/vc_raw_html][\/vc_column][\/vc_row][vc_row el_class=\u00a0\u00bbcontainer vls_mauto specialcontainer\u00a0\u00bb css=\u00a0\u00bb.vc_custom_1637247477940{margin-bottom: 0px !important;padding-top: 120px !important;padding-bottom: 0px !important;}\u00a0\u00bb][vc_column][vc_column_text]Missions Publiques. Lorsque vous \u00e9tiez au du cabinet du Pr\u00e9sident de la r\u00e9gion de Bruxelles, vous cr\u00e9ez les \u00ab\u00a0contrats de quartier\u00a0\u00bb. De quoi s\u2019agit-il\u00a0? <\/strong><\/span><\/p>\n

\u00a0<\/strong>Paul Vermeylen. <\/strong>Bruxelles est marqu\u00e9e par un c\u0153ur de ville qui, en dehors de la Grand-Place et du rond-point Schuman, ne cesse de s\u2019appauvrir. Face \u00e0 cette dualisation, nous devions cr\u00e9er de nouveaux dispositifs pour agir de mani\u00e8re transversale et int\u00e9gr\u00e9e. L\u2019id\u00e9e\u00a0: agir pour revitaliser ces quartiers (entre 3000 et 6000 habitant-e-s). Un contrat de quartier est donc un contrat entre la r\u00e9gion et la commune concern\u00e9e (Bruxelles compte 19 arrondissements\/municipalit\u00e9s). A la mani\u00e8re d\u2019une poup\u00e9e russe, ce contrat g\u00e9n\u00e8re une contractualisation avec une s\u00e9rie d\u2019acteurs\u00a0:\u00a0 des commer\u00e7ants, des \u00e9coles, des associations d\u2019habitants, etc. Le programme d\u2019action doit se r\u00e9aliser en seulement quatre ans. Il touche plusieurs domaines\u00a0: l\u2019immobilier mais aussi l\u2019am\u00e9lioration ou l\u2019embellissement de l\u2019espace public et le socio-culturel\/professionnel. L\u2019enveloppe financi\u00e8re (20 millions d\u2019euros) peut donc servir \u00e0 am\u00e9nager un rez-de-chauss\u00e9e d\u2019immeuble, \u00e0 cr\u00e9er des missions locales en charge de l\u2019insertion professionnelle, une association pour des femmes ou encore des dispositifs d\u2019\u00e9cole des devoirs. Le programme doit \u00eatre valid\u00e9 par un comit\u00e9 local. Ce comit\u00e9, pr\u00e9sid\u00e9 par la municipalit\u00e9, est constitu\u00e9 d\u2019habitant-e-s, de commer\u00e7ant-e-s et de repr\u00e9sentant-e-s d’institutions de services. Ensemble, ils valident ce programme, et celui-ci ne peut \u00eatre modifi\u00e9 pendant les quatre ans si et seulement si la commission en d\u00e9cide. Pourquoi seulement quatre ans\u00a0?\u00a0 Parce que nous voulions donner un coup de fouet \u00e0 des investissements qui avaient tendance \u00e0 tra\u00eener. Cette r\u00e9volution a \u00e9t\u00e9 l’aspect le plus difficile \u00e0 faire passer aupr\u00e8s des acteurs publics notamment. Ces contrats ont \u00e9t\u00e9 un succ\u00e8s d\u00e8s le lancement. Depuis 1993, nous comptabilisons une centaine de contrats de quartier \u00e0 Bruxelles, qui je pense, ont contribu\u00e9 \u00e0 apaiser les tensions sociales dans la ville.<\/span><\/p>\n

\u00a0<\/strong><\/span><\/p>\n

Missions Publiques. <\/strong>Si vous deviez inventer une nouvelle forme de dispositif participatif, sur quoi mettriez-vous l\u2019accent\u00a0?<\/strong><\/span><\/p>\n

\u00a0<\/strong>Paul Vermeylen. <\/strong>Depuis 5 ans, je pr\u00e9side un Think tank bas\u00e9 \u00e0 Bruxelles \u00ab\u00a0For Urban passion\u00a0\u00bb au sein duquel gravitent des urbanistes du secteur public et priv\u00e9 mais aussi des sociologues, des investisseurs, etc. Notre r\u00e9flexion se porte beaucoup sur \u00ab\u00a0comment gouverner la ville autrement\u00a0?\u00a0\u00bb. Notre dernier Forum avait pour th\u00e8me \u00ab\u00a0Cool planning\u00a0\u00bb, c\u2019est-\u00e0-dire comment r\u00e9agir face au changement climatique et notamment le r\u00e9chauffement ? Ce que nous avons not\u00e9, c\u2019est que les initiatives qui r\u00e9ussissent en Europe sont celles qui impliquent une multitude d\u2019acteurs. Une solution ne sera jamais technique et unidimensionnelle. Elle sera toujours complexe, parfois redondante, hybride et int\u00e9grant diff\u00e9rents aspects. Si je devais lance un nouveau dispositif participatif, ce serait autour du th\u00e8me \u00ab\u00a0comment r\u00e9-ensauvager la ville\u00a0\u00bb, comment r\u00e9concilier cette derni\u00e8re avec la nature, une nature qui ne soit pas celle des campagnes.<\/span><\/p>\n

L\u2019autre th\u00e8me central est la question sociale. La crise sanitaire a instaur\u00e9 la m\u00e9fiance envers l\u2019autre par l\u2019imp\u00e9ratif de la distanciation, et encore accentu\u00e9 \u00e0 la s\u00e9gr\u00e9gation sociale. De quelle mani\u00e8re peut-on r\u00e9inventer des solidarit\u00e9s de proximit\u00e9\u00a0? Avec l\u2019Etat providence, vous avez un m\u00e9canisme de solidarit\u00e9 proc\u00e9durale\u00a0: vous cotisez \u00e0 la s\u00e9curit\u00e9 sociale, vous \u00eates couverts pour les maladies. Vous \u00eates un num\u00e9ro. Avec les solidarit\u00e9s de proximit\u00e9, on cr\u00e9e de multiples dispositifs \u00e0 l\u2019\u00e9chelle de proximit\u00e9 qui offrent une assistance et une garantie pour assurer le principe d\u2019\u00e9quit\u00e9.<\/span>[\/vc_column_text][vc_column_text]<\/p>\n

\n

A partir du moment o\u00f9 vous donnez la parole aux citoyennes et citoyens concern\u00e9s, l\u2019\u00e9motion, la sensibilit\u00e9, la couleur surgissent. Et donc une tout autre expression de la demande.<\/p>\n<\/blockquote>\n

[\/vc_column_text][vc_column_text]Missions Publiques. <\/strong>Dans votre dernier livre \u00ab\u00a0la ville sensible (2)\u00a0\u00bb, vous \u00e9voquez des exp\u00e9riences riches, sensibles, qui prennent le temps de l\u2019\u00e9coute citoyenne. Laquelle de ces d\u00e9marches vous para\u00eet particuli\u00e8rement int\u00e9ressante si on devait la d\u00e9ployer dans les villes moyennes fran\u00e7aises ?<\/strong><\/p>\n

\u00a0<\/strong>Paul Vermeylen. <\/strong>La ville sensible est guid\u00e9e par d\u2019autres param\u00e8tres que quantitatifs. A partir du moment o\u00f9 vous donnez la parole aux citoyennes et citoyens concern\u00e9s, l\u2019\u00e9motion, la sensibilit\u00e9, la couleur surgissent. Et donc une tout autre expression de la demande. Une jeune urbaniste originaire d\u2019Ha\u00efti, qui a fait ses \u00e9tudes \u00e0 Bruxelles, pratique l\u2019urbanisme th\u00e9rapeutique, c\u2019est-\u00e0-dire du \u00ab m\u00e9nagement \u00bb de quartiers ou d\u2019espaces (et non plus l\u2019am\u00e9nagement). Prenons l\u2019exemple d\u2019un grand parc de Rotterdam dans lequel une s\u00e9rie de probl\u00e8mes sont apparus. Son travail va d\u00e9buter par des enqu\u00eates de terrain sur place, elle pratique une sorte de \u00ab table de conversation \u00bb, comme sous l\u2019arbre \u00e0 palabre de Schuiten (3), o\u00f9 l\u2019on \u00e9tudie chacune des questions soulev\u00e9es de mani\u00e8re tr\u00e8s concr\u00e8te. Une zone du parc est trop min\u00e9ralis\u00e9e, il y fait tr\u00e8s chaud en \u00e9t\u00e9. La solution ? Des plantations qui vont permettre de recr\u00e9er progressivement une canop\u00e9e et des zones d\u2019ombre. A un autre endroit, une zone est trop humide et regorge de flaques d\u2019eau quand il pleut. L\u00e0, une marre \u00e9cologique va \u00eatre cr\u00e9\u00e9e. On va donc m\u00e9nager le parc, on ne l\u2019am\u00e9nage plus. On abandonne cette id\u00e9e tr\u00e8s pr\u00e9sente en ville de la d\u00e9molition\/construction qui ne colle pas \u00e0 la demande citoyenne mais plut\u00f4t \u00e0 la volont\u00e9 d\u2019urbanistes et d\u2019architectes qui veulent laisser leur empreinte. Cette d\u00e9marche n\u2019est pas th\u00e9orique et ne requiert pas beaucoup de moyens hormis du soft power <\/em>et de l\u2019intelligence collective.<\/p>\n

Deuxi\u00e8me \u00e9l\u00e9ment important de cette ville sensible\u00a0: la capacit\u00e9 d\u2019agir des habitant-e-s sur leur territoire. A Barcelone – c\u2019est une grosse m\u00e9tropole mais l\u2019exemple est totalement transposable dans une ville moyenne \u2013 on agit concr\u00e8tement pour r\u00e9duire la peur de s\u2019exprimer dans et sur la ville. Bien entendu, il y a la police, l\u2019\u00e9clairage\u00a0; mais en d\u00e9finitive les habitant-e-s se sentent d\u00e9poss\u00e9d\u00e9s de leur pouvoir d\u2019agir. Josep Bohigas, directeur g\u00e9n\u00e9ral de la r\u00e9gion m\u00e9tropolitaine de Barcelone,\u00a0met en place un syst\u00e8me de management de quartiers multidimensionnel. Exemple\u00a0: des \u00e9quipes avec un policier et un-e habitant-e sont charg\u00e9es de faire des visites\u00a0pour d\u00e9tecter d\u2019\u00e9ventuels probl\u00e8mes. L\u2019id\u00e9e ici est de valoriser la rencontre. Autre exemple.\u00a0 Plut\u00f4t que de d\u00e9placer un march\u00e9 qui pose des probl\u00e8mes de cohabitation, on cherche de nouvelles mani\u00e8res de g\u00e9rer ce march\u00e9 pour qu\u2019il s\u2019ins\u00e8re au mieux dans le quartier. La demande des citoyens est de se sentir en s\u00e9curit\u00e9 mais aussi d\u2019\u00eatre reconnus comme acteurs par des administrations trop souvent d\u00e9shumanis\u00e9es. On donne la priorit\u00e9 aux \u00ab\u00a0Smart citizens<\/em>\u00a0\u00bb plut\u00f4t qu\u2019au tout technologique \u00ab\u00a0Smart city\u00a0\u00bb.<\/em> De tels types de dispositifs sont d\u00e9ployables \u00e0 n\u2019importe quelle \u00e9chelle. Ce qui est int\u00e9ressant avec les villes moyennes, entre 30\u00a0000 et 100\u00a0000 habitant-e-s, c\u2019est qu\u2019elles ont une capacit\u00e9 plus importante \u00e0 agir. Le maire de Malines, une ville belge de 80\u00a0000 habitant-e-s, a mis en place des initiatives de ce type. Il y a 8 ans, la ville votait \u00e0 30% pour l\u2019extr\u00eame-droite. Aujourd\u2019hui, cette derni\u00e8re repr\u00e9sente moins de 10%. Dans le domaine de la s\u00e9curit\u00e9, on obtient des r\u00e9sultats remarquables en \u00e9coutant les habitant-e-s et en valorisant leur pr\u00e9sence.<\/p>\n

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Missions Publiques. Quel sera le mod\u00e8le de d\u00e9veloppement des villes de demain\u00a0?<\/strong><\/p>\n

Paul Vermeylen. <\/strong>Nous vivons actuellement un reflux du mythe de la m\u00e9tropolisation, qui est l\u2019expression spatiale de la globalisation et de la mondialisation. Il y a 10 ans, on misait tout sur la m\u00e9tropole comme motrice du d\u00e9veloppement pour drainer l\u2019\u00e9conomie. Aujourd\u2019hui, sous l\u2019effet de la crise climatique et sociale, les territoires se dessinent autrement. De plus en plus, des mod\u00e8les de co-d\u00e9veloppement \u00e9mergent, au sein de villes de tailles vari\u00e9es dans lesquelles la coop\u00e9ration apporte une importante valeur ajout\u00e9e. A l\u2019\u00e9chelle des r\u00e9gions et pour rendre leur territoire attractif, c\u2019est beaucoup plus int\u00e9ressant de travailler \u00e0 la compl\u00e9mentarit\u00e9 des villes plut\u00f4t que de laisser chacune d\u2019elles tirer la couverture \u00e0 soi. C\u2019est le cas de Munich par exemple et sa constellation de villes autour\u00a0: chacune contribue \u00e0 la prosp\u00e9rit\u00e9 r\u00e9gionale. La \u00ab\u00a0sp\u00e9cialisation\u00a0\u00bb des territoires est donc cruciale pour les villes moyennes. D\u2019autre part, le \u00ab\u00a0Made in\u00a0\u00bb ou le \u00ab\u00a0produire localement\u00a0\u00bb ne concerne pas que les salades, mais aussi la production industrielle. De plus en plus de villes agissent en ce sens.<\/p>\n

Enfin, j\u2019observe que le th\u00e8me de \u00ab la ville europ\u00e9enne \u00bb revient tr\u00e8s fortement sur la sc\u00e8ne. Je pense notamment \u00e0 l\u2019initiative de la Commission europ\u00e9enne \u00ab New European Bauhaus \u00bb (4). Pour faire court, la m\u00e9tropolisation se calquait avant sur le mod\u00e8le du capitalisme \u00e0 la mode am\u00e9ricaine \u2013 \u00e0 l\u2019image de Manhattan avec une tr\u00e8s forte concentration des lieux de la d\u00e9cision dans quelques quartiers. Aujourd\u2019hui, il y a un vaste int\u00e9r\u00eat pour la ville de proximit\u00e9, d\u2019une dispersion de la densit\u00e9 des fonctions, de quartiers mixtes et r\u00e9silients. Demain, je vois donc des villes plus petites et plus intenses, qui se nourrissent de leurs rapports \u00e0 la nature et qui coop\u00e8rent entre elles. Pour nous, Europ\u00e9ens, retrouver ou r\u00e9inventer notre culture de la ville, c\u2019est une chance.<\/a>[\/vc_column_text][vc_column_text]<\/p>\n

Pour aller plus loin\u00a0:<\/strong><\/span><\/p>\n